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Journal d’une voyageuse solo-de Moncton à Madrid

C’est en profitant de 2 excellents vols, que je suis arrivée à Madrid jeudi matin à 8h30.  Je dis excellents, puisque banals.  Rien que de l’ordinaire.  Et en ces temps tumultueux que nous vivons,  l’ordinaire est plutôt exceptionnel et réjouissant.

J’ai fait le premier vol Moncton -Toronto assise à côté d’un fier Acadien noir  de 40 ans, Forest Poirier adopté par une famille de musiciens d’Atholville et plus tard dans une famille de fermiers de Grand-Sault.  Il tente de faire comprendre aux   Brayons en leur expliquant leur histoire, qu’ils sont de véritables  Acadiens. Forest se dit ambassadeur du Nouveau-Brunswick.  Il me dit que tous les Néo-Brunswickois comme lui qui travaillent dans l’ouest du pays sont nos véritables  ambassadeurs, qu’ils se cherchent entre eux lorsqu’ils sont au loin, que leur coin de pays  leur  manque, qu’ils sont fiers de se dire de notre province et qu’à chaque occasion, ils prennent l’avion pour revenir dans la région.

Le vol Toronto-Madrid fut tout aussi agréable et non moins surprenant.  Il y eut quelques heures d’attente dans l’aéroport  de Toronto .. heures qui passèrent très rapidement.  Les nombreux changements de portes à la dernière  minute pourraient  mettre à rude épreuve la patience des passagers dans l’aéroport;  mais ceux-là restent calmes et se déplacent en continuant de causer avec leurs compagnons de voyage.  Ils ont compris que de s’énerver dans ces circonstances serait  totalement inutile.  Le temps passé dans l’aéroport est une partie  du voyage qui ne manque pas d’intérêt.

Comme j’étais au début de la file, je suis rentrée  dans la cabine de l’avion assez rapidement. J’ai alors  pu constater qu’un groupe d’une vingtaine de jeunes de 18-20 ans, prenaient  place juste devant moi. J’ai pensé à la nuit qui m’attendait…. Avant le décollage, une des profs leur a  demandé de baisser le ton (un ton plutôt raisonnable je dirais dans les circonstances) …un  rappel qu’ils partageaient la cabine avec plusieurs autres personnes.  Je dois dire que  mes préjugés en ont pris un coup. Ces jeunes Torontois souriants, calmes,  très polis et gentils  entre eux , se parlaient plutôt bas. Donc une nuit étonnamment tranquille. Nous étions dans un appareil très récent. Sur la quinzaine de films disponibles , près de la moitié n’étaient pas MADE IN USA et en lieu d’un rideau de fenêtre à descendre, on appuyait  sur un bouton au bas de la fenêtre, pour  choisir la luminosité.

La chaleur était au rendez-vous  à Madrid…on nous annonce rien de moins que 32 degrés toute la semaine et certains jours 36 degrés.  La chaleur provoque des habitudes que nous des pays plus froids connaissons moins.  Si on pense  aux trottoirs, par exemple.  Les gens marchent sur le côté le plus ombragé.  L’autre côté est vide.  L’espace au milieu des édifices à appartements, qui accueille des terrains  de jeux ou une piscine pour les plus chanceux, sont vides de midi jusqu’en fin d’après-midi.  Les persiennes et autres couvre-fenêtres sont fermés.  On a l’impression que les habitants de ces appartements ont tous quitté le quartier.

Madrid, une très belle ville de plus  de 3 millions pour passer un séjour agréable.

 

Les aînés et l’engagement social

Depuis plus de vingt ans, de nombreuses recherches sur le vieillissement soulignent l’importance de « l’engagement social » dans le maintien global de la santé. D’après ces études, l’interaction entre individus favorise le maintien de la santé aux niveaux cognitif, physique et émotionnel. D’après Chappell, McDonald et Stones, il se peut que l’interaction avec d’autres individus de la communauté soit plus importante pour les aînés que pour tout autre tranche de vie.

Aux États-Unis, la Fondation MacArthur est reconnue pour ses recherches sur le vieillissement. D’après les études menées par cette fondation depuis plusieurs décennies, l’engagement social est un des principes qui définit une vieillesse positive.

Être impliqué socialement sous-tend que les aînés, à la mesure de leurs habiletés, soient engagés dans des situations d’échanges verbales, de prises de décisions, de négociation, de résolution de problèmes et de traitement de nouvelles informations. Puisque nous sommes des êtres qui avons évolué en société, toutes ces compétences ont été acquises, à différents niveaux au fil des ans. Grâce à l’effet cumulatif des expériences de vie, l’implication sociale des aînés maintient et possiblement augmente les fonctions cognitives et émotionnelles. Landry (2014), ajoute que l’implication au niveau social est le moyen de résister à l’isolement; élément destructeur dans le cadre du vieillissement.

En 2011, le BBC news a publié un article intitulé « Loneliness is the ‘hidden killer’ of the elderly »; [La solitude est l’ennemi invisible des aînés, ( traduction libre)]. On y apprend qu’en Angleterre, près d’un aîné sur dix souffre de solitude intense. En 2006, une étude publiée dans la revue American Sociological Review stipule que 25% des Américains n’ont pas de confidents c’est-à-dire de personnes avec qui partager leurs pensées les plus intimes et, ce phénomène s’accroît depuis 1985. Ces gens vivent en marge de la société et n’ont pas ou peu de connexion sociale avec d’autres.

En 2014, la même agence a publié une étude qui démontre qu’un nombre grandissant d’hommes seuls ne réussissent pas à s’intégrer aux activités communautaires et souffrent de solitude et d’isolement. La Fondation MacArthur tire des conclusions semblables pour les États-Unis.

Ces études indiquent que les hommes qui vieillissent seuls et malheureux sont souvent veufs ou divorcés. Dans leur vie de couple, les épouses étaient souvent le maillon entre les membres des familles, celles qui tissaient les liens avec les voisins et la communauté et qui, au besoin, tendaient la main vers les autres. Donc, ces hommes en général n’ont pas l’habitude d’initier des démarches au niveau social et par conséquent ne sont souvent pas motivés à s’intégrer aux activités communautaires.

Mais si les hommes sont plus nombreux à vieillir isolés, bon nombre de femmes connaissent le même sort. Le manque d’intérêt pour les activités organisées et le niveau d’estime de soi pourraient jouer un rôle dans leur isolement. Et, c’est à se demander quel rôle la peur, le manque d’estime de soi ou le manque de confiance en l’autre jouent dans l’équation. Une étude menée par Saab, Matthews et McDonald postule que certains sujets féminins ont tendance à percevoir l’environnement social comme un aspirateur d’énergie plutôt que le contraire. Et, certaines le considère même comme une menace.

Il semble que le désir de ne pas s’impliquer au niveau social relève souvent des expériences antérieures, du manque de confiance en soi et du manque de confiance envers les autres. Pour certains, s’engager dans sa communauté semble une tâche au-delà de leurs forces. Est-ce que nous pouvons faire quelque chose pour aider au moins certains de ces individus?

SeniorAction soutient que le vieillissement peut être une étape de vie riche en possibilités, tant au niveau personnel que social. Ainsi, le site présente desentretiens avec des aînés qui, chacun à sa façon, devient un modèle d’interaction communautaire. Nous tentons donc de démontrer que l’engagement social enrichit la vie et lui donne un sens. Les personnalités avec qui nous nous sommes entretenus sont des aînés qui ont comme qualités premières courage et générosité. Ces personnes focalisent sur autre chose que le corps vieillissant, les pertes de mémoire, les courbatures ou la perte d’ouïe. Comme au hockey, ils lancent et comptent! Ce faisant, leur niveau de bien-être augmente et, par ricochet, ils deviennent des sources d’inspiration et d’éducation.

Il y a une multitude de ces personnes âgées qui travaillent discrètement dans toutes les sphères de la société. Elles contribuent non seulement au bon fonctionnement mais aussi à la qualité des services offerts. Pourtant, peu sont reconnues.

SeniorAction croit qu’il est important de reconnaître toutes les initiatives menées aujourd’hui par les aînés afin d’avoir un éclairage réaliste sur leur contribution au niveau social. Reconnaître les aînés qui servent de mentors aux jeunes employés en milieu de travail; célébrer les seniors qui font du bénévolat dans les pays du tiers-monde; honorer les bénévoles qui accompagnent les mourants, travaillent dans les prisons, s’occupent des sans-abris, travaillent auprès des écoliers, visitent les foyers de soins ou encore, libèrent les aidants naturels de façon ponctuelle.

SeniorAction propose la participation soutenue des aînés dans les émissions télévisées pour exposer l’ampleur de leur engagement social. Les personnes aînées sont nombreuses, mais les médias ne leur accordent ni la visibilité ni le temps d’antenne qui les représentent. La visibilité médiatique des aînés provient surtout des annonces publicitaires. Et pourtant, les aînés sont plus que des bouffeurs de médicaments ou consommateurs de voyages.

SeniorAction souligne une initiative qui gagne à être encouragée; celle de projets communautaires intergénérationnels où jeunes, salariés et aînés se concertent pour réaliser une activité, un projet ou geste qui va au-delà de projets individuels. Par exemple, à l’approche des Fêtes, nous sommes témoins de la coopération de toutes les générations pour aider les plus démunis. Ce type d’initiative intergénérationnelle gagnerait à être promu davantage.

SeniorAction serait prêt à participer et à rendre public l’engagement du personnel et des étudiants d’une école qui, en collaboration avec des aînés de leur communauté, initieraient un projet intergénérationnel pour une cause sociale qui leur tient à cœur. Le défi est lancé!
SeniorAction fait également appel à ses abonnés afin de recevoir des témoignages inspirants, entre autres, de projets intergénérationnels qui ont eu lieu dans leur communauté : ex; projets Lire-faire lire, projets Communication orale en langue étrangère via Skype, projets Foire de Sciences. Dans une communication ultérieure nous avons l’intention de partager certains projets de ce genre. Ce faisant, nous osons croire que, comme la boule de neige qui grossit en descendant la pente nous contribuerons, en travaillant ensemble, à encourager la création de multiples projets au sein desquels petits, grands et aînés travaillent en coopération dans un projet social significatif.

Références
Chappell, Neena, McDonald Lynn, Stones Michael (2008, 2004), Aging in Contemporary Canada, Pearson Education Canada, Toronto, Ont.
Coughlan,Sean (2011),www.bbc.co.uk/news/education-12324231

Landry, Roger (2014). Live long, die short, Green book Group Press, Austin.
Saab,PG, Matthews KA, Stoney CM, McDonald RH, Loneliness and Health: Potential Mechanisms, Psychomatic Medicine 64:407-417(2002)
Tun, A. Patricia, Martinez-Miller Dan, Lachman, Margie, Seeman,Teresa (2013), www,ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3508192

Auteur : Jeanne Brideau
Tous droits réservés sans la permission écrite de l’auteur.

La passerelle vers la survie

Article écrit par Jeanne Brideau

Récemment, vous avez peut-être perdu un être cher, un parent, un ami, un collègue. Il y a quelques mois, j’ai perdu un ami: un sportif, un battant, un bon diable. C’était le mari de ma cousine et tout l’hiver j’ai pensé à elle avec empathie et compassion, car je sais comment la perte de notre compagnon de vie peut être difficile, voire tragique. Il est certain que mon expérience et celle de ma cousine sont différentes car nous avons été éprouvées à des âges différents, moi à 30 ans et elle à la fin de la soixantaine. Puisqu’elle est septuagénaire et que c’est une femme forte qui vit courageusement avec une maladie grave, elle est mieux équipée émotivement que je l’étais. Néanmoins, elle vit la perte de son partenaire de plusieurs décennies, du père de ses enfants, de son partenaire de projets et de vacances, de son meilleur ami. Sa vie est changée pour toujours.

C’est en pensant à elle que tout l’hiver j’ai fait une recherche sur le deuil et ce, pour lui suggérer le livre qui pourrait l’aider. En ce faisant, j’ai re-visité ma vie de femme seule et de mère monoparentale et ainsi, j’ai pu reconnaître la résilience et le courage qui se sont manifestés au fil des ans et qui m’ont aidée à devenir la personne que je suis.

Vous savez, les endeuillés ont tellement besoin de l’amour et de l’amitié des gens qui les entourent. Mais, à moins d’avoir perdu son conjoint/e on ne peut vraiment pas comprendre la peine qu’ils/ elles vivent. Donc, ce n’est pas facile de les accompagner.

Pour répondre au besoin d’empathie et de compréhension des endeuillés et des personnes les accompagnant, des auteurs ont raconté leurs expériences suite à la perte d’êtres chers. Ces écrivains parlent de leur peine, rattachent la souffrance à leurs valeurs personnelles, avouent que l’aide fournit par les relations inter-personnelles a été précieuse. Ils ont les mots pour parler de la tristesse, de la solitude et de la peur vécues. Et, de plus, ils témoignent de la vie qu’ils ont créée après la mort du mari, du père, du partenaire de vie, de l’ami/e.

À la suite à ces lectures, j’ai préparé des comptes rendus de certaines parutions sur le thème de la perte d’un être cher. J’espère que ces suggestions sauront inspirer les endeuillés ainsi que ceux qui les aiment et qui veulent les aider à se recréer une vie. Ces critiques se trouvent sur notre site web Adagio-seniors.com sous Contenu– Comptes rendus de livres. Si vous êtes bilingue, je vous encourage à examiner les livres suggérés en anglais car ceux-ci sont complémentaires à ceux en français.
Tous droits réservés sans la permission écrite de l’auteur.

Vous connaissez peut-être un livre portant sur le deuil que vous recommanderiez. Écrivez vos suggestions. Un compte rendu du livre recommandé serait apprécié mais pas essentiel. Avec votre aide, notre réseau de soutien aux endeuillés sera lancé. Merci pour votre contribution dans la boîte de commentaires.

Vieillir

Par Père Zoël Saulnier

Pourquoi inviter un « vieux » comme moi à parler à des gens comme vous, des aîné(e)s, sur l’art de bien vieillir? Voilà la question que je me suis posé au lendemain de l’invitation. Y-a-t-il un art de bien vieillir dans ce monde qui est le nôtre?
Je me suis dit, si ce n’était que pour nous aider à avoir un regard réaliste sur cette situation de vie qui est la nôtre et que personne ne peut empêcher. Bien des gens parfois refusent d’accepter de vieillir, parce que vieillir dans un monde basé sur la productivité, sur la compétitivité, ce n’est pas rentable.

Et pourtant, nous les aîné(e)s, nous sommes un peu la ristourne de notre société. Nous sommes la moisson d’une bonne récolte au cœur de notre peuple. Nous avons beaucoup investi, nous nous sommes engagés et nous devrions être fiers de nos engagements toujours.
Pourtant, il est important de croire dans le rôle social des aîné(e)s malgré les politiques de la mise à l’écart des « vieux » que nous sommes, de cette mise en boîte de ceux et celles qui vivent le vieillissement.

A l’occasion de notre rencontre d’aujourd’hui, nous pouvons affirmer en toute lucidité : on peut être milliardaire, on peut être président du plus grand pays du monde, on peut être ceci ou cela, personne ne peut empêcher le vieillissement. En face d’une réalité qui un jour nous pète dans la face, que faire? Nous savons que les choses évidentes sont les choses les plus difficiles à vivre, ou à accepter.

Qu’allons-nous faire?

Un confrère l’autre jour me disait, me connaissant et connaissant mon entourage : « il y a beaucoup de chaises vides autour de toi! » Il confirmait dans sa sagesse ce que je constate et que parfois, je refuse de voir ou d’accepter.

Une première réaction en face du vieillissement qui est plus qu’évident, c’est le déni. Nous sommes dans une société de déni, une société du mythe californien de l’éternelle jeunesse. Le déni me fait vivre dans l’illusion, dans le refus d’un regard lucide de ce que je suis vraiment. Souvent j’entends des gens me dire à l’occasion de mes quatre-vingts ans, ce n’est qu’un chiffre. Derrière cette réflexion, il y a une réalité que j’appelle le déni.

Quant à moi, c’est plus qu’un chiffre. C’est la démonstration évidente que le temps passe, que je n’ai pas la gestion du temps et que la machine qui est mon corps, cette machine est en marche et donne des signes d’usure, de fatigue. Une réalité que je dois affronter chaque jour et que j’ose affirmer, c’est la même chose pour vous.

Il faut arrêter de se servir des slogans à la mode pour mieux cacher la réalité. En acceptant de vieillir, je suis invité à passer de l’illusion à la réalité et à me vivre dans la pleine acceptation de cette réalité comme je l’ai fait pour tous les âges de la vie. Nous avons passé de l’enfance à l’adolescence, de l’adolescence à l’âge adulte, enfin comme on l’affirme dans un langage poétique pour dorer la pilule : je suis à l’automne de la vie.

Au lieu de jouer à la jeunesse éternelle, un rêve inventé de toute pièce, si bien vieillir pour moi était d’accepter de prendre le temps de vivre, ce que je n’ai pas eu le temps de faire vraiment parce que bousculé par un horaire, par un programme, par un patron, par mon « boss ».

Un jour, un grand papa invite son petit-fils à venir passer du temps avec lui. Avec leur lunch, le petit-fils et le grand papa s’en allèrent ensemble au bout du quai et ils ont passé une partie de la journée à flâner, à regarder, à rire ensemble, à rencontrer des gens en toute liberté. Quand le petit-fils rentra chez lui, son père et sa mère, lui demandèrent : «Qu’as-tu fait avec papi?» Le petit-fils avec un sourire sur un visage d’enfant comblé a répondu : «Nous avons regardé la mer. C’était beau, c’était le fun! C’était cool!» Deux regards qui sont identiques à différents moments d’une vie. Les parents ont haussé les épaules en se demandant, quelle pilule, le papi avait donné à l’enfant.

Dans la réponse du petit-fils, ils ont compris que vieillir, c’est cesser de se donner de l’importance à partir d’un moule social imposé, c’est sortir de l’illusion, c’est prendre le temps de vivre cet accord enfantin avec la vie en humant le parfum d’une fleur, en goûtant le temps et les choses autour de nous, dans leurs profondeurs. Une conversion en profondeur pour ne pas rater ce beau moment de « vieillir » dans le déroulement de ma vie qui porte en elle l’odeur d’une grande liberté.

Vieillir, c’est aussi important que naître!

J’aime souvent comparer la personne que vous êtes et que je suis à une plante. La plante, elle pousse, elle grandit, elle fleurit, elle donne du fruit dans son milieu qui est le sien, le terreau qui est le sien.

Nous, les aînés, nous sommes à la phase de la maturation, du fruit partagé dans la transmission de nos valeurs, de la moisson à contempler avec émerveillement, avec action de grâces. Voilà un aspect positif du vieillissement : vivre vraiment ce qu’est l’action de grâce. Laisser la gratitude émerger de nos gestes, de nos regards sur soi et les autres. Vivre la reconnaissance trop souvent refoulée dans un placard.
Qu’on cesse de nous percevoir comme des gens en phase terminale et qu’on nous intègre dans une politique de transformation sociale essentielle dans notre milieu, en autant que nous-mêmes nous soyons convaincus que nous sommes à notre âge des investisseurs sociaux indispensables à l’avenir de la société.

Je dirais que notre société s’est appauvrie quand elle a chiffré le temps de la retraite. Rien de pire qu’une loi pour tuer la vie.
Le « vieillir » doit se vivre dans la continuité. C’est une faiblesse de notre société de croire que tout commence aujourd’hui au lieu de vivre en fidélité avec l’héritage reçu. Cet héritage reçu nous le portons dans nos bagages. L’ainé doit s’engager dans un processus de transmission intergénérationnelle.

Trop d’aîné(e)s s’installent sur la voie d’évitement et attendent ainsi la mort, la dernière tombée du rideau. Tout paraît avoir changé autour de nous et en nous naissent des inquiétudes, des peurs, des questions et même parfois des démissions.

Un premier constat : nous sommes conscients nous les aîné(e)s plus que les jeunes de ce que j’appelle un bousculement anthropologique qui fait que même nos capacités de voir, de saisir, de comprendre semblent ne plus tenir. Et c’est normal dans un monde où les changements sont tellement fréquents, les changements constants deviennent une manière de vivre. Et même comme aîné(e)s nous n’avons plus les mots pour dire notre tremblement intérieur devant ces changements qui nous bousculent. Jadis on pouvait affirmer telle chose, mais aujourd’hui notre langage semble impuissant, aussi bien au point de vue politique, au point de vue religieux et culturel. Nous pouvons parfois vive un désarroi et nous avons l’impression non pas d’avancer mais de régresser sans la fidélité à soi-même, et à ses valeurs.

Pour mieux assumer le monde d’aujourd’hui, il est bon en cette rencontre de porter un regard sur le monde que nous avons connu non pas pour le juger mais pour mieux le reconnaître et s’y engager avec la force de nos convictions humaines et chrétiennes.
Nous avons connu un monde de respect qui engendrait le silence, la soumission, où l’histoire de nos institutions, où les modes de vie selon un ordre disciplinaire conventionnel nous guidaient. Ce qui à nos yeux engendraient une stabilité, une permanence au niveau des engagements et d’une parole donnée.

Mais voilà que dans ce bousculement anthropologique nous assistons à une mutation globale qui occasionne une fracture, une brisure, une rupture entre ce qui a été et ce qui est aujourd’hui. Une rupture avec la souveraineté du sacré, des traditions et des coutumes.

D’une société rigide que nous avons connu nous avons peu à peu et parfois brusquement passé à une société flexible fondée sur l’information. Tout est médiatisé au risque parfois d’être souvent biaisé. Une information souvent plus subjective qu’objective. Une information filtrée à travers les lunettes de ceux et celles qui nous informent et qui peuvent faire de nous des proies faciles à déstabiliser.

Il n’existe plus de frontières et depuis le «mai 1968 à Paris», il est interdit d’interdire. Tout sert à la publicité même les choses les plus sacrées. Le sexe est un objet de consommation comme du « chewing gum ». Nous assistons au culte du naturel, du « cool », de la cordialité et de l’humour. L’affectivité s’exprime dans des gestes. La casquette à palette se porte partout même dans la douche et devient l’habit de gala de nos jeunes.

Tout cela a des conséquences dans l’âge du vieillissement qui est le nôtre. Tout cela a des conséquences, sans rien bouder, il faut accepter cette nouvelle façon pour la société de s’organiser, de s’orienter et cela dans une nouvelle façon de gérer les comportements d’aujourd’hui, avec moins de contraintes possibles, avec moins de coercition et plus de compréhension possible. Au lieu de dire « dans notre temps » où nous avons connu un monde où la réponse était donnée avant que la question soit posée, aujourd’hui, nous vivons dans un monde où la question est posée et la réponse est donnée par celle ou celui qui questionne. Ce qui donne à un déplacement dans la perception et le vécu des mêmes valeurs connues et vécus autrement.

C’est le temps des solidarités intergénérationnelles : rien ne peut se bâtir sans que nous prenions au sérieux ce rôle de transmission des valeurs que sont les nôtres, dans la fidélité à soi-même et pour affronter cette peur du lendemain dans les remous des jours où tant de vie sont à la dérive. Transmettre ce qui encore à cette étape notre vie nous fait vivre et qui peut apporter la vie à d’autres générations, en proposant et non imposant nos valeurs comme une manière de vivre. Dans tous les changements, prendre conscience des solides rapports intergénérationnels qui existent aujourd’hui et qui permettent une transmission intelligente et pertinente des valeurs. On dit qu’il faut dialoguer avec vos enfants et ça va se régler. Mais à quoi mène ce dialogue si on a pas de repères de part et d’autre, si on n’a plus de philosophie de vie, de cadre de référence, si on n’a pas de morale cohérente, si on n’a plus de mémoire, de distance pour aller au-delà des émotions du moment.

Plus que jamais a besoin de l’expérience de vie, de la sagesse des aîné(e)s. Les clubs de l’Age d’Or ne doivent d’aucune façon être un repli sur soi, mais au contraire un lieu de vie et de partage pour mieux nous convaincre comme groupe social qu’il faut créer des solidarités entre les générations.

Comme aîné(e)s, nous serons honnêtes dans notre rôle de transmission, si nous osons contester la société, cette culture, ces modes psychologiques du court terme où l’on passe d’une expérience à l’autre sans laisser mûrir une seule. Il faut éviter de tomber dans le piège du mépris de ce que nous avons vécu et de ce que nous avons été.

Une solidarité toute particulière m’interpelle par les temps qui courent où la jeune génération (les 20-30 ans) est confrontée à une détérioration environnementale sans précédent, à la fragilisation des diplômes, aux difficultés à l’emploi, à la précarité de l’embauche, à la vulnérabilité des acquis sociaux, aux pouvoirs impérieux et incessants de la technologie.

Comment nous les aîné(e)s pouvons-nous venir en aide à cette génération défavorisée à tant de point de vue?
Comment la jeune génération peut-elle apporter support et encouragement aux personnes comme nous?

C’est par le biais des grands-parents que s’effectuent les échanges entre les générations : le transfert des traditions et des valeurs.
C’est la confiance, la tendresse et la gratuité qui caractérisent le mieux la relation entre les grands-parents et les enfants et les petits-enfants.

Les femmes et les hommes de toutes les générations sont appelés à fonder la solidarité intergénérationnelle sur le dialogue respectueux et sur l’ouverture au changement, ce qui devrait conduire à la compréhension réciproque ainsi qu’à la transmission mutuelle de valeurs humaines.

Un aîné ou une aînée responsable doit faire au cœur de notre monde, ce changement réel et souvent inconscient afin de vivre son rôle social selon son âge de vie.

Nous sommes passés d’un monde où la personne, l’être humain que je suis que vous êtes se perdait dans l’ensemble, dans la globalité, dans le clan familial ou social à un monde où la personne s’est détachée de l’ensemble, de la tribu, du clan, de la fragilité de la famille.
Les institutions comme l’Église, l’école n’ont plus la force de donner des motivations, alimenter les désirs, les besoins, même le temps et les loisirs.

Du dressage autoritaire et mécanique nous sommes passés à la programmation optionnelle de la personne. Dans nos vies, jadis comme au restaurant, il y avait un menu, mais maintenant, nous vivons un comportement à la carte.

Aujourd’hui, c’est l’individu avant tout qui doit vivre le libre déploiement de sa personnalité intime, qui doit apprendre à légitimer la jouissance dans la libération des mœurs (l’hédonisme), qui doit apprendre à reconnaître les demandes personnelles et singulières, à moduler les institutions sur les aspirations des individus.

Ce sont les valeurs individualistes : vivre libre sans contrainte jusqu’à choisir sa manière de mourir. Voilà je dirais le fait social et culturel de notre temps.

L’individu a une identité propre qui motive tout, les actions sociales, religieuses et culturelles.
Par rapport ce que nous avons connu et vécu, nous vivons dans une société du vide, c’est l’apothéose de la consommation dans la sphère privée comme collective, c’est le triomphe de l’image jusque dans l’égo.

Quelqu’un a écrit c’est le vide en « technicolor » où il n’y a plus aucune idéologie politique capable d’enflammer les foules. La société postmoderne qui est la nôtre n’a pas d’idole, de tabou, plus d’image glorieuse d’elle-même, plus de projet historique mobilisateur à notre point de vue.

Dans cette étape de ma vie qu’est le « vieillir », le vieillissement, quelles sont les réactions de notre part? À partir de ce constat qui précède et qui est réaliste sans être négatif, il faut se dire que chaque civilisation a ses forces et ses faiblesses et ainsi aujourd’hui prendre le temps de se poser la question : «Qu’en est-il des valeurs qui sont miennes dans ce brassage, dans ce « whip cream?»
La conversion de tout mon être voulue et assumée : vieillir, ce n’est pas se retirer du monde mais c’est offrir une nouvelle lecture engageante de notre monde le bagage qui est le mien.

Une conversion en profondeur est mienne. J’emprunte le mot « conversion » au jargon religieux à cause de sa connotation qui nous renvoie à l’essentiel de la personne, sa dimension intérieure. Il n’est pas obligatoire d’être croyant ou croyante pour vivre cette conversion en profondeur, c’est l’aspect changeant qui m’invite à vivre le « vieillir » comme une conversion, une aventure inédite où tout est unique parce qu’assumé et non subi.

Le « vieillir » comme le moment unique de faire la boucle au cœur de nos vies personnelles. Si « vieillir » était le temps de découvrir en nous l’enfant qui a disparu et ainsi retrouver l’émerveillement qui peut nous permettre de voir le monde avec des lunettes nouvelles, comme le papi du début et de l’enfant.

Si « vieillir », c’était le temps de regarder vraiment en soi et autour de soi pour laisser vivre la beauté que nous avons mis en veilleuse trop souvent dans un monde froid où

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